Henry Merleau-Ponty

Joseph Henry est né le 5 décembre 1849 à Rochefort. Son père, François Henry Merleaux dit Ponty, y exerçait la profession de commissionnaire de roulage, autrement dit entrepreneur de messageries, et sa mère, Adèle née Dernas avait le statut de propriétaire. Henry est le cadet, "tard venu", d'une famille de trois enfants : Anne Elodie, née en 1826, et épouse de Jean-Baptiste Auguste Thèze, médecin de marine et Joseph William, né en 1828 à Saujon, qui épouse Léontine Turpain (1833-1862) en premières noces, et en secondes noces, le 25 avril 1865, Marguerite Sonolet, dont il aura deux enfants : Amédée William (1866-1915) et Yvonne Andrée Germaine.

 Après avoir suivi les cours du collège de Rochefort, en qualité d'élève interne, Henry sort major de promotion de l'Ecole navale en octobre 1868. Il sert sur le Magenta, puis sur la Sibylle et est nommé second sur une prise prussienne capturée au large des Açores en 1870. En 1873 il suit les cours de défense sous-marine de Boyardville et est nommé officier torpilleur sur la corvette cuirassée la Reine Blanche, et sur le croiseur Laplace en 1875. Il est l'auteur et le diffuseur de plusieurs inventions, dont un indicateur électrique du nombre de tours de machines et un système de signaux de nuit, et au service hydrographique il met au point un nouveau « manuel de pilotage ». Henry est à deux reprises officier d'ordonnance du Ministre de la Marine, puis second du Marengo en escadre du Nord auprès de l'amiral Gervais qui l'apprécie particulièrement et le reprend à son service comme chef d'état-major sur le Richelieu et sur le Brennus. C'est à partir de 1897 qu'il se voit confier la responsabilité de poursuivre l'implantation du port et de l'arsenal de Bizerte.

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Henry Merleau-Ponty, commandant du Marceau, cuirassé d'escadre

Le Bulletin de notes confidentielles conservé aux archives du Fort de Vincennes nous donne au fil des ans les appréciations concernant le futur Amiral. Appréciations excellentes de ses supérieurs, légèrement entachées par une condamnation de huit jours d'arrêt de rigueur à bord de la Frégate la Sybille, le 11 septembre 1870, pour acte d'insubordination. Le dossier fait référence à des faits jugés scandaleux : apparemment d'avoir participé à des manifestations et chansons grivoises mettant en cause des femmes à bord dont l'une est qualifiée de Pompadour au petit pied ! Il protestera en écrivant qu'à l'accusation portée contre lui il « prête la complicité de son silence ! On voudrait faire de moi l'eunuque de la parole ! »  Henry montre alors qu'il est un homme de caractère !

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Henry Merleau-Ponty

En 1872 c'est « un jeune officier qui promet beaucoup (...) fort intelligent, il a de l'activité et du commandement ». En 1874 c'est un des officiers « les plus capables de propager et de pratiquer la science des torpilles. Officier d'avenir... A bord de la Reine Blanche il passe en 1875 Capitaine de vaisseau sous l'autorité de M. de Freycinet, sorti premier de l'école et de toutes les applications... Il est noté « hors ligne : il réunit à l'intelligence et à l'activité de la jeunesse une rare maturité de jugement », en 1879, et est proposé pour la Légion d'Honneur : il est fait Chevalier dans cet ordre en 1881. Henry Merleau-Ponty alterne entre 1880 et 1895 des fonctions d'Etat-Major à Paris et des périodes à bord des cuirassés Colbert et Marengo, puis sur le croiseur Cosmao et de nouveau sur les cuirassés Richelieu et Brennus. Henry se marie tardivement avec Alice Anne Marie Jones, fille d'Algermon Henri Jones, avocat à la cour d'appel, avocat de la Marine, et de Isaline Hedelhofer. Son épouse, surnommée Annette par toute la famille, lui apporte en dot un capital de cent vingt-deux mille francs et des "espérances de fortune" pouvant être évaluées à vingt mille francs de rente...

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Henry et Annette Merleau-Ponty

Henry Merleau-Ponty, lieutenant de vaisseau et officier d'ordonnance du ministre de la Marine, est l'un des témoins d'Aline Merleau-Ponty, le 27 décembre 1888 à Saint-Vincent de Paul, lors de son mariage avec Georges Dufour. Dix années plus tard, en février 1899, Georges est nommé médecin de la division navale de Tunisie à bord du garde-côte Tempête et il va y assumer la responsabilité médicale de l'hôpital de l'arsenal en création.

 Henry Merleau-Ponty décède le 28 août 1902 et est inhumé le 2 septembre au cimetière de Passy. Lors de ses obsèques de nombreux discours sont prononcés, et notamment par le vice-amiral Gervais qui fait état de sa lumineuse intelligence, de son grand cœur, évoque son compagnon fidèle et collaborateur avisé, et surtout son ami profondément affectionné :

 Parler de l'amiral Ponty revient à tracer le portrait de l'officier complet : « De vastes connaissances qu'alimentaient le goût et l'amour de l'étude, science consommée de marin, hardiesse réfléchie, solide jugement, esprit clair et ordonné, infaillible bon sens, et le don précieux de traduire infailliblement sa pensée ! (...) Honoré, admiré, aimé de tous en Tunisie - de tous sans exception - il laisse un nom indissolublement lié à la création de Bizerte. Et cet homme si énergique, ce travailleur acharné qui semblait toujours absorbé par sa tâche, était doué du cœur le plus tendre, le plus rempli de bonté et de générosité. (...) La mort l'a fauché brutalement, en pleine sève, en pleine maturité, alors que sur lui reposaient tant d'espérances ! (...) Ayant vu disparaître soudain une compagne adorée (Alice Anna Marie Jones, son épouse, décédée 1e 18 juin 1897, dans le 17e à Paris), il s'était trouvé atteint jusqu'au plus intime repli de son être et n'avait pu jamais ni voulu se consoler. Qui sait si sa vie n'a pas filtré par cette blessure. »

 D'autres discours tout aussi élogieux sont prononcés : par M. Pichon, Résident général de la République en Tunisie, par M. Lacapelle, Contrôleur général de l'Armée, qui insiste sur les qualités humaines du défunt : « Les souvenirs émus de tous ceux dont je parle, depuis les plus humbles, depuis les plus ignorés jusqu'aux plus intimes, vont tous, dans une unanimité touchante, à la bonté de l'homme, au 'bon amiral', comme on l'a appelé. » Deux derniers éloges sont prononcés à Paris : celui du Colonel Dolot, Directeur du Génie en Tunisie, et celui de M. Moncelon, vice-président de la municipalité de Bizerte. A bizerte, au moment où est amené le pavillon de l'amiral Ponty, c'est le Général Marmier, Gouverneur de Bizerte qui prend la parole pour évoquer l'œuvre grandiose, « Depuis la reconnaissance du lac de Bizerte, effectuée étant commandant du Cosmao en décembre 1892, il a travaillé sans cesse à la création d'un port et d'un arsenal maritime qui devaient transformer du tout au tout, à notre très grand avantage, la situation de la France dans la Méditerranée ».

Etat signalétique des services de l'amiral Henri Merleau-Ponty.

Grades successifs :

Aspirant de 2e classe : 1er août 1867

Aspirant de 1e classe : 2 octobre 1868

Enseigne de vaisseau : 15 août 1870

Lieutenant de vaisseau : 19 août 1877

Capitaine de frégate : 9 février 1889

Capitaine de vaisseau : 8 juin 1895

Contre-amiral : 7 janvier 1901

Détail des services :

Ecole Navale Borda : 1865-1866-1867

Jean-Bart : 1868

Vaisseau cuirassé Magenta : 1869

Frégate à voile Sibylle : 1870

Frégate cuirassée Savoie : 1871

Majorité générale Rochefort : 1871

Travailleur : 1872

Transport mixte Rhin : 1873

Ecole des défenses sous-marines : 1874

Corvette cuirassée Reine Blanche :19/7/1875 au 1/4/1876

Croiseur de 2e classe Laplace : 1/4/1876 au 18/12/1877

Commission supérieure des défenses sous-marines :18/12/1877 au 1/4/1879

Cuirassé Provence : 1/4/1879 au 1/7/1881

Frégate à voile Alceste : 1/7/1881 à 1882

Etat major général Paris : 1882 au 1/5/1883

Aviso Elan (Ecole de pilotage) : 1/5/1883 au 20/10/1885

Cuirassé Colbert : 20/10/1885 au 1/2/1888

Etat major général Paris : 1/2/1888 au 1/2/1890

Cuirassé Marengo : 1/2/1890 au 1/2/1892

Etat major général Paris : 1/2/1892 au 1/9/1892

Croiseur Cosmao : 1/9/1892 au 15/10/1894

Cuirassé Richelieu : 15/10/1894 au 1/10/1895

Cuirassé Brennus : 1/10/1895 au 1/7/1897

Cuirassé d’escadre Marceau : 1/7/1897 au 1/3/1899

Division navale de Tunisie et Garde côtes Tempête : 1/3/1899 au 1/8/1902

Commandements

Elan en 1883 – 1884 et 1885

Cosmao en 1893 et 1894 (escadre méditerrannée)

Richelieu en 1894 et 1895

Brennus en 1895 et 1896

Marceau en 1897 et 1898

Tempête et division navale de Tunisie en 1899 et 1901

Commandant en chef de la division navale de Tunisie en 1901 et 1902

Citations, distinctions honorifiques, récompenses :

Chevalier Légion d’Honneur du 19/1/1881

Officier Légion d’Honneur du 10/7/1891

Officier d’académie du 24/12/1888

Officier de l’instruction publique du 4/10/1898

8 témoignages officiels de satisfaction (Ministre et Commandant en Chef)